Inspiré d’un fait divers qui a secoué le monde du sport américain, Foxcatcher est un film multi-facettes, compliqué à appréhender, mais qui mérite vraiment d’être vu.
Il raconte la relation improbable entre un milliardaire excentrique (Steve Carell) et deux frères champions de lutte David Schultz (Mark Ruffalo) et Mark Schultz (Channing Tatum). Un trio d’acteurs plein de justesse.
Pour les deux sportifs, c’est la gueule de bois au lendemain des J.O. de Los Angeles 1984. Ils reviennent médaillés mais retournent à l’anonymat des salles de province.
Le frère aîné, David, se construit un équilibre autour de sa femme et de ses enfants. Mark, plus solitaire, sombre lui plutôt dans la dépression, façon Rambo après le Vietnam.

« Philatéliste, philanthrope et ornithologue »
John E. Du Pont (Steve Carell), richissime mégalo passionné de lutte gréco-romaine, est aussi « patriote, philatéliste, philanthrope et ornithologue ». Avec des passions pareilles, les amis ce n’est pas trop ça… il veut donc des médailles aux J.O. de Séoul pour compenser.
Comme ça, sa mère – qui ne jure par l’élevage de chevaux et la chasse au renard – arrêtera peut-être de le prendre pour un raté.
Le Serge Dassault local aligne les billets pour attirer les deux frères dans sa propriété baignée dans le brouillard, en Pennsylvanie, où un centre d’entraînement ultra-moderne vient d’être construit.

Lancinant, implacable, glacé comme une bruine hivernale, le piège se referme sur les deux lutteurs. Mais n’était-il pas posé dès le départ ? Les deux hommes ont été abandonnés par leur père. Leurs choix ont été irrémédiablement conditionnés par cet épisode de leur vie.
Dans ce long-métrage, le poids du déterminisme (familial, mais aussi social) est comme un boulet que portent tous les personnages en silence. Oubliez The Wrestler, Raging Bull et autres Rocky. Pas d’affrontements magnifiés par l’image, ni même une lutte entre deux frères, mais plutôt une histoire magistrale de personnages en recherche de reconnaissance.
L’espoir se résume à quelques travellings dans un décor trop opaque pour être honnête, sur fond d’envolées lyriques.
Mention en passant à la bande originale, qui remplit ici parfaitement son rôle et capte l’attention grâce à quelques bons chuintements de guitare. Mais au feu les effets de la manche, c’est ici la sobriété qui est de mise.

Brutale, accélérée après tant de lenteur, la résolution de Foxcatcher un fatum libérateur. Bennett Miller, le réalisateur, le dit autrement au magazine Première :
Je voulais que Foxcatcher fasse l’effet d’une gifle !
Le metteur en scène de Truman Capote et du Stratège livre avec ce Foxcatcher un drame maîtrisé, qui préfère au classicisme à la virtuosité, le formalisme au maniérisme, pour installer son ambiance froide, impersonnelle. Un choix qui peut agacer. Pourquoi ? Parce qu’il ne correspond pas aux standards du cinéma d’aujourd’hui. Celui d’images sans c…, prêtes à toutes les compromissions pour séduire.
Dans l’inconfort de Foxcatcher, ses scènes étirées en longueur, le Mal(sa)in s’instille progressivement, et son œil de Néron se fait sentir, jusque dans la caméra qui livre un documentaire bidon sur le milliardaire mégalo.
Et vous, qu’en avez-vous pensé ? N’hésitez pas à donner votre avis dans les commentaires.
Foxcatcher, de Bennett Miller. 2 h 14. En salles.
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