Série | Dérapages, ressources inhumaines

Diffusé sur Arte en avril dernier et désormais sur Netflix, « Dérapages » est un haletant thriller social option pétage de câble, avec l’acteur Eric Cantona dans le rôle titre. Cette mini-série de six épisodes, réalisée par Ziad Doueiri (“Baron noir”), est inspirée d’un roman de Pierre Lemaitre (Prix Goncourt pour Au revoir là-haut en 2013) qui cosigne également le scénario avec Perrine Margaine. Ce livre à l’origine de la série, « Cadres Noirs », a d’ailleurs obtenu le Prix du Polar Européen en 2010.

« Dérapages » décrit l’engrenage dans lequel est pris Alain Delambre (Éric Cantona), DRH expérimenté. Senior licencié en raison de son âge, chômeur en fin de droits, il s’enfonce peu à peu dans la dépression. Prêt à tout pour retrouver sa place dans la société, il est contacté par un très secret cabinet de recrutement pour décrocher un poste-clé chez un géant de l’aéronautique et fonce tête baissée. Mais le processus d’embauche est pour le moins étrange…

Pour recruter un nouveau profil, et aussi tester “la loyauté” et “la résistance à la violence” de ses meilleurs cadres, le PDG Alexandre Dorfmann (Alex Lutz) imagine le scénario d’une fausse prise d’otages menée par de vrais mercenaires. Mais les choses vont-elles vraiment se passer comme prévu ?

Mené à fond de train et malgré quelques lourdeurs d’écriture, le plaisir du récit policier à nous décrire des pourritures impunies est ici palpable à chaque instant. « Salauds de riches », semble crier Alain Delambre, mû par une colère froide, double inversé de Grandgil (Jean Gabin) dans « La Traversée de Paris ». Si l’on connaît ici vite l’issue de l’histoire et la vitesse inquiétante à laquelle le héros s’y précipite, impossible ici de deviner le déroulement des évènements. Et bordel, de l’imprévisible ailleurs que dans le domaine des crises sanitaires, ça fait du bien.

Entre humour noir et critique acerbe du management libéral, « Dérapages » est un polar glaçant aux personnages ambivalents, dont les zones d’ombre s’étendent au fur et mesure qu’elles sont éclairées par la lumière.

Mais tout ceci ne pourrait fonctionner sans de bons acteurs. Le rôle d’Alain Delambre semble avoir été écrit pour Éric Cantona. Face à lui le PDG Alexandre Dorfmann est campé par un Alex Lutz magistral. Un vrai méchant qu’on adore détester. Les seconds rôles sont également très convaincants. Je pense à Gustave Kervern, qui incarne Charles, le meilleur ami du héros, plus émouvant qu’à l’habitude.

Inspiré d’un véritable fait divers
Organiser une prise d’otage pour éprouver la résistance au stress de ses cadres ? Le point de départ de « Dérapages » n’a – hélas – rien d’une fiction, puisqu’il s’inspire d’une agression terroriste simulée qu’ont subi plusieurs cadres de la régie publicitaire de France Télévisions. Les faits remontent à l’automne 2005.
Philippe Santini, directeur général de la régie publicitaire de France Télévisions, veut tester le sang-froid de ses plus proches collaborateurs et il organise cette lugubre expérience menée par de vrais mercenaires. Pendant un heure et quart, les salariés qui n’étaient pas au courant, sont cagoulés, menottés, malmenés.

Des conséquences terribles en interne
Révélé un mois plus tard par « Le Canard Enchaîné », ce récit à peine croyable fait peu de bruit à l’époque. Pourtant très vite, les conséquences en interne sont terribles après cette expérience brutale et humiliante : dégâts psychologiques pour certains collaborateurs, quant d’autres “sont poussés en dehors de l’entreprise ou partent par découragement”, raconte Mediapart dans une longue enquête publiée des années après les faits. Condamné à 2500 € d’amende en 2010 pour « complicité de violences aggravées avec préméditation, et usage ou menace d’une arme…», Philippe Santini ne quittera lui France Télévisions qu’en 2012.

Quant à une éventuelle saison 2, n’y comptez pas trop. Pierre Lemaitre, en désaccord sur le choix de l’acteur principal, s’est retiré du projet qui comportait initialement une suite.

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